Laïcité et religion: Quand la foi des autres nous heurte


Par Benoit Voyer

24 juin 2024

La pratique religieuse des immigrants irrite les Québécois de souche.

Il y a quelques jours, en juin, des personnes de religion musulmane se sont rassemblés au parc des Hirondelles, dans l'arrondissement Ahuntsic-Cartierville, à Montréal afin de souligner la fête de l'Aïd al-Adha. Il s’agit de la fête la plus importante pour l’islam. Ce jour-là, les familles présentent portent leurs plus beaux vêtements traditionnels, partagent des cadeaux, font la fête et prient ensemble.[1]

A cet endroit, la messe catholique de la communauté italienne y est également sporadiquement célébrée.

Dans le métro montréalais, il n’est pas rare de voir le Krishna chanter et manifester publiquement leur foi.

Une sérieuse réflexion s’amorce sur la manifestation de la foi de chacun sur la place publique. En voici deux exemples :

La foi des autres nous heurte
Régis Labeaume disait à Christian Bégin a “La Grand-messe”[2] : “Ce qui dérange émotivement les Québécois de souche, c’est la pratique religieuse des immigrants. Les communautés culturelles sont plus croyantes que nous autres”. [...] “Nous on n’a plus de croyance. Nous autres, on est laïcs et on a raison (de l’être)”. [...] “Mais tu n’peux pas empêcher le monde de croire !” [...] “ [Ce constat] nous heurte pas mal plus qu’on le pense” [...] “La foi des autres nous heurtes...”.

Pour reprendre Chesterton

A Qub radio, en mai 2024, si je me souviens bien, Mathieu Bock-Côté disait : “Autant la laïcité est évidemment nécessaire pour assurer un espace public délivré du communautarisme ethnoreligieux, autant la laïcité n’a jamais eu pour vocation d’effacer ce qu’on pourrait nommer les rituels fondamentaux au cœur de notre culture et de nos cultures [...]

Je pense que le Québec avait raison en 1960 de rompre avec un catholicisme qui était devenu clérical, hégémonique et dominateur. Le rôle de l’Église dans la société était à remettre en question. [...]

[Maintenant], on constate qu’on a un peu jeté le bébé avec l’eau du bain. J’entends par là qu’une société qui décide de privatiser la spiritualité [...] en la désincarnant, c’est-à-dire en la réduisant en une pure préférence personnelle, c’est une société qui a terme ne va pas simplement se laïciser. Pour reprendre la formule de Chesterton : Lorsque l’homme cesse de croire en Dieu ce n’est pas qu’il ne croit plus en rien, mais il croit ensuite en n’importe quoi [...]

On est arrivé à ce moment de notre histoire ou il faut se réconcilier avec l’héritage [culturel] du catholicisme [...] Je pense que [...] cette hostilité [à l'égard de l’Église catholique] finit par faire de nous un peuple qui cesse de toucher ses dernières racines et je ne connais aucune civilisation à l’échelle de l’histoire a pu faire l’économie d’un noyau religieux”.

Religion et laïcité au Québec : La réflexion ne fait que commencer.


[1] Cf. Presse canadienne. Sur le site de Noovo info (page consultée le 24 juin 2024). www.noovo.info/nouvelle/la-celebration-dune-fete-musulmane-dans-un-parc-a-montreal-fait-reagir.html

[2] Cf. La Grand-messe de Régis Labeaume animée par Christian Bégin. Sur le site de Télé Québec (page consultée le 24 juin 2024) http://video.telequebec.tv/player/47756/stream?assetType=episodes