Par Benoit Voyer
31 décembre 2024
A chaque Jour de l’an, plusieurs d’entre nous prenons des résolutions pour l’année qui commence. Quelques semaines plus tard, elles tombent une après les autres. On le sait tous, il faut beaucoup de volonté pour garder ses résolutions jusqu’au 31 janvier et bien peu sont encore vivantes le 1er février.
Je vous fais une confidence: Depuis de quelques années, je prends toujours la même résolution: ne pas en prendre. Est-ce que cette année je ferai la même chose? Je ne sais pas encore. Il me reste quelques heures pour y penser.
Dans le numéro de décembre 1953 de la revue Trinitas, Jean-Paul Regimbal souhaite une bonne année 1954 à ses lecteurs. Il écrit : « Une année s’achève, une autre suivra… Le temps infailliblement se perd dans le temps et entraine avec lui tous les hommes vers la maison du Père dont la porte est celle du tombeau. Oh! Ce que peut être une vie? … Un échec formidable ou un admirable triomphe, succès ou désastre souvent renfermé dans la décision énergique d’un moment. A l’aurore de cette année, une résolution est à prendre, un choix à établir. Cette fois, pourquoi ne pas apporter une résolution ferme, constante, durable, héroïque même? N’est-ce pas l’assurance d’une vie pleinement vécue? » [1]
C’est bien vrai: « Le temps se perd dans le temps. [...] Les années qui passent nous conduisent vers notre finalité ».
La vie va vite, vraiment trop vite. On dirait que plus je vieillis, plus je sens que chaque journée qu’il m’est encore permis de vivre est courte. Je n’arrive jamais à tout faire ce que j’ai planifié en 24 heures. Est-ce que je terminerai tout ce que je veux faire avant de m’éteindre? A 58 ans, il me reste évidemment moins d’années devant moi que derrière. J’en suis conscient: je suis dans mon sprint final. Ainsi donc, je sens de plus en plus que je dois me concentrer sur l’essentiel pour réaliser pleinement ce qui me reste à faire et à vivre.
Et le frère Jean-Paul de Jésus [2] questionne avec intelligence: « Ce que peut être une vie? » Et se répond à lui-même: « Un échec formidable ou un triomphe admirable. »
Et moi, qu’est-ce que je choisis? Bien entendu, je me souhaite du succès. Je veux le meilleur pour ma vie. Toi aussi, j’imagine...
Alors, « ce que peut être une vie? », questionne le Trinitaire. En fait, qu’est-ce que devient ma vie ou qu’est-ce que je veux vraiment pour celle-ci. Je réfléchis à la réponse depuis quelques semaines. J’ai trouvé quelques bribes.
Pour la nouvelle année, Jean-Paul Regimbal invite chacun à prendre une résolution ferme, voire héroïque : il insinue, bien entendu, de prendre bien soin de sa relation à Dieu: « N’est-ce pas l’assurance d’une vie pleinement vécue? », lance-t-il.
C’est vrai qu’on oublie souvent le bon dieu. Il passe après tout le reste, mais dès que plus rien ne va, il est le premier vers qui nous crions: « Pourquoi, mon Dieu? ». Et on l’accuse de tout ce qui nous arrive, alors qu’on sait fort bien que nous sommes les premiers responsables des choix que nous faisons. Nous sommes créés libres.
D’ailleurs, parlant de choix, lequel ferais-je en 2025?
Au fond de moi, je sens que je dois persévérer dans la voie que j’ai commencée, il y a quelques mois: chaque jour, allumer ma petite chandelle, m’asseoir et dire au bon dieu: « Me voici, je suis la... Je ne sais pas trop quoi te dire, mais je suis la... Aujourd’hui, je veux te laisser entrer un peu dans ma vie » Et puis, fermer mes yeux, faire silence et me laisse habiter par LA lumière.
Ce simple geste quotidien répété jour après jour est assurément le plus héroïque que je puisse réaliser. Comme le disait un saint espagnol: le plus important n’est pas de commencer des nouveaux projets, mais de persévérer dans ceux déjà commencés malgré les défis à surmonter. L’héroïsme n’est pas dans les grandes réalisations, mais dans les petits gestes qu’on répète jour après jour, par amour [3].
La plus grande invitation que l’humain n’a-t-il pas eu au fil des siècles, n’est-elle pas celle dont fait écho la bible, une demande faite à Moise : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton esprit... » ? (Dt 6,5) Ce sera fort probablement ma résolution de 2025: continuer de lui laisser une petite place, au nom de l’amour.
Et puis, comme l’écrivait Christian Lépine : « En présence de Dieu, je découvre la vérité sur moi-même ».[4] C’est bien vrai, lorsque je prends le temps de m’arrêter, j’apprends à me voir tel que je suis. Et si je le suis, je ne peux que devenir de plus en plus humain. N’est-ce pas ce que Jésus ajoutait à la loi de Moise : «… et ton prochain, comme toi-même »? (Mt 22, 37-39)
Ainsi donc, plus j’apprends à m’aimer dans la pure vérité de ce que je suis, plus je peux aimer ceux que je rencontre au quotidien. A l’école de Jésus, plus on s’imprègne du divin, plus on devient humain.
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[1] Jean-Paul de Jésus. « Vie de la bienheureuse Anna-Maria Taïgi – Une résolution bien gardée », Trinitas - revue du tiers-ordre et de l’archiconfrérie de la très sainte Trinité, Vol. 1 No. 1, décembre 1953 – janvier 1954, p.9 à 11.
[2] Jean-Paul de Jésus était le nom religieux de Jean-Paul Regimbal avant le Concile Vatican II. Il sera ordonné prêtre le 11 mai 1957
[3] Saint Josémaria Escriva écrivait: « Oublie ce goût de poser les premières pierres et fais en sorte de poser la dernière pierre à un seul de tes projets » (Chemin, no 42)
[4] Christian Lépine. Créés pour être aimés, Médiaspaul, 2012, p.66