ARTICLE DU JOUR: La bienheureuse Marie-Anne Blondin

Marie-Anne Blondin repose dans la cathédrale de Saint-Jérôme
La bienheureuse Marie-Anne Blondin

Par Benoit Voyer

23 août 2025

Le 18 avril 1809, à Terrebonne, naît Marie-Esther Blondin, fille de Jean-Baptiste Sureau dit Blondin, un agriculteur, et de Marie-Rose Limoges. Elle est la troisième d’une famille de douze.

Elle vient d’un milieu pauvre et sa jeunesse est marquée par des deuils et des épreuves. Comme bien des enfants francophones du Canada, elle est analphabète. Toute sa vie son manque d’éducation sera une souffrance pour elle.

Jeune adulte, elle fera la connaissance de la Congrégation Notre-Dame, fondée par sainte Marguerite Bourgeois. Elle assiste à leur arrivée à Terrebonne et deviendra domestique au couvent. Les sœurs en profiteront pour lui apprendre à lire et à écrire.

A 22 ans, elle devient étudiante et novice a la Congrégation. On lui donne le nom de Sœur Sainte-Christine. A cause de sa santé, on la renvoie. Esther vivra une grande tristesse.

A 33 ans, Suzanne Pineault l’invite à se joindre à elle pour enseigner aux enfants. Ainsi, elle devient institutrice à l’école paroissiale de Vaudreuil. En peu de temps, Esther deviendra la directrice de l’établissement qu’on nommera l’Académie Blondin. En plus d’instruire les petits, elle forme des jeunes filles afin qu’elles deviennent enseignantes pour les écoles rurales.

En 1848, Esther parle à l’abbé Paul-Loup Archambault [1], le curé de Vaudreuil, de son rêve de fonder une communauté religieuse pour l’éducation des enfants pauvres. Il la soutient dans ses démarches, mais lui dit : Ma fille, « attendez-vous a beaucoup souffrir ». Au printemps, l’évêque de Montréal, Mgr Ignace Bourget, encourage l’initiative, malgré quelques réserves.

Le 8 septembre1850, Mgr Ignace Bourget officialise la fondation des Filles de Sainte-Anne. Esther devient sœur Marie-Anne et la première supérieure. Malgré la pauvreté de la communauté, les premières années seront tout de même heureuses.

Buste de la bienheureuse dans l'église Saint-Jacques de Montcalm
En avril 1853, à Vaudreuil, des notables s’opposent à la construction d’un couvent sur le terrain de la fabrique. A cause de l’expansion rapide de la nouvelle communauté, celui-ci est devenu un incontournable. Cette décision oblige les sœurs de quitter le patelin, durant l’été. Trois religieuses demeurent en poste à Vaudreuil. Le chocest brutal pour l’abbé Paul-Loup Archambault. Les Sœurs de Sainte-Anne s’établissent à Saint-Jacques-de-l ’Achigan.


Nommé aumônier, l’abbé Louis-Adolphe Maréchal [2], 29 ans, fait la vie dure à la supérieure. Il ne cesse de la dénigrer auprès de Mgr Bourget et des religieuses. De plus, il s’immisce dans les décisions de la communauté pour imposer sa vision des choses.

En août 1854, afin de régler le conflit, Mgr Ignace Bourget demande à Marie-Anne Blondin de « se déposer et de ne plus accepter le mandat de supérieure si ses sœurs veulent la réélire. »

Le jeune aumônier ne lâche par le morceau. Devenue directrice au convent de Sainte-Geneviève, il colporte qu’elle administre mal l’institution. En 1858, Mgr Bourget la ramène à la maison mère, avec la consigne de « prendre les moyens pour qu'elle ne nuise à personne. »

Elle sera affectée à d’humbles tâches à la buanderie, au sous-sol de la maison mère de Lachine. Ne gardant aucune rancune, elle y passe ses journées loin de l’administration de la communauté qu’elle a fondée. Elle dira souvent qu'il y a « plus de bonheur à pardonner qu'à se venger. »

Dans les premières heures de 1890, Marie-Anne Blondin, 80 ans, sachant qu’il lui reste peu de temps à vivre, demandera à sa supérieure de faire venir à son chevet l'abbé Maréchal, « pour l'édification des sœurs. »

Marie-Anne Blondin décède le 2 janvier 1890, à Lachine.

Le 29 avril 2001, sur la Place Saint-Pierre, au Vatican, Jean-Paul II la déclare bienheureuse. A son sujet, Paul-André Comeau me dira : The Globe and Mail, « est le seul quotidien national qui a joué à la une la béatification de la fondatrice des Sœurs de Sainte-Anne. Cette équipe a jugé que cela est un événement de société qui interpelle. Une femme qui, en 1850, fonde une communauté religieuse et qui dira à Mgr Bourget que dans les écoles de campagne il faut qu’il y ait des écoles mixtes par qu’il n’y a pas assez de monde... Il faut le faire! C’était audacieux pour l’époque! »[3]

L’Église catholique du Canada souligne sa mémoire le 18 avril de chaque année.

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[1] Louis Rousseau, « ARCHAMBAULT, PAUL-LOUP (baptisé Paul) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , https://www.biographi.ca/fr/bio/archambault_paul_loup_8F.html
[2] Louis Rousseau, « MARÉCHAL, LOUIS-DELPHIS-ADOLPHE (baptisé Louis-Delphis) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , https://www.biographi.ca/fr/bio/marechal_louis_delphis_adolphe_12F.html
[3] Benoit Voyer. « Les Témoins de l’essentiel », Éditions Logiques, 2005, p. 75.

Toile de la bienheureuse Marie-Anne Blondin au Sanctuaire de Sainte-Anne-de-Beaupré