7 septembre 2025


ARTICLE DU JOUR: 37e anniversaire de décès de Jean-Paul Regimbal


Il y a 37 ans, Jean-Paul Regimbal quittait ce monde

Par Benoit Voyer

7 septembre 2025

Ce 8 septembre est le 37e anniversaire du décès de Jean-Paul Regimbal.

Né le 4 juillet 1931, le père Jean-Paul Regimbal a été un véritable phénomène de l’histoire religieuse du Québec, du Canada et du monde catholique. A son époque, il a laissé bien peu de gens indifférents. Les uns étaient favorables à sa cause. Les autres le voyaient comme un illuminé ayant ramené le fondamentalisme en terre québécoise ou encore ils se moquaient de ce qu’on qualifiait d’exagérations ou de sensibleries religieuses.

Au Québec, dans notre mémoire collective, peu de religieux ont laissé une telle trace. Comme Victor Lelièvre, Henri Roy et plusieurs autres, il a laissé la sienne. Il est de cette race de passionnés qui a parlé de Dieu et qui a rejoint directement les attentes intérieures de milliers de personnes.

Jean-Paul Regimbal était un passionné. Il avait la passion des choses divines. Il s’est donné corps, âme et esprit pour ce Jésus qui a séduit son cœur. Il n’a jamais compté les heures. « Reposez-vous donc un peu! », lui disaient des confrères. « Je me reposerai lorsque je serai dans ma tombe! » répondait-il impulsivement, le sourire aux livres, puisque Jean-Paul avait un bon sens de l’humour.

Plusieurs de ceux et celles qui l’ont connu personnellement sont décédés. Néanmoins, il en reste quelques-uns. Je fais partie de ceux-ci.

Lui et moi
Le père Jean-Paul Regimbal est étroitement lié à mon histoire personnelle et familiale.

A partir de janvier 1974, ma mère le suit et s’impliquera à la maison de ressourcement spirituel des Trinitaires, à Granby.

En 2024, a 90 ans, il lui arrive encore, sporadiquement, d’aller faire acte de présence aux retraites spirituelles du père Michel Vigneau. Michel a connu maman alors qu’il était jeune novice. Ainsi, en 2024, il y a plus de 50 ans que maman fréquente les Trinitaires et leurs retraitants.

De mon côté, j’étais présent la première fois qu’elle a participé à une soirée de prière du lundi animée par le père Jean-Paul Regimbal. J’avais 7 ou 8 ans, si mon souvenir est bon. Bien entendu, je m’en souviens, même si je me suis endormi à ses pieds sur une couverture. C’était une longue soirée pour un jeune garçon.

Plusieurs années plus tard, mon père fera de même. Devenu un visage familier dans le réseau granbyen du père Regimbal, il sera le dernier à le visiter à l’hôpital de Granby le soir de son décès, le 8 septembre 1988.

Une mission particulière
Un jour, en tête à tête, Jean-Paul me dit : « Je me permets une petite confidence. Dans la prière, le Seigneur m’inspire. Souvent, il met dans mon cœur des certitudes. Lui, il est appelé à ceci. Un autre est appelé à ça. Et, étonnamment, grâce à l’Esprit saint, je suis bien aiguillé. Mais depuis quelques années, je n’y arrive pas avec toi. Ma seule certitude est que tu es appelé à une mission particulière, c’est-à-dire a quelque chose que le Seigneur sait et qu’il te révélera lui-même ». Il m’a fallu longtemps pour comprendre cette chose si simple.

A l’automne 2023, en effectuant mon travail de relecture de vie, j’ai pris conscience – Et ça a été comme une révélation pour moi – qu’une grande partie de mon histoire personnelle et familiale est mêlée de près ou de loin au père Jean-Paul Regimbal et à son ordre religieux.

Je l’ai assez bien connu. Je dis assez bien, puisque j’ai reçu, au fil des années, plusieurs confidences de ses frères Trinitaires et de personnes qui l’ont connu.

Jean-Paul était un homme fort intelligent, ayant une grande foi en la Trinité, loyal à son ordre religieux et à l’écoute de ses supérieurs. Et surtout, il avait un grand amour pour les gens qu’il côtoyait, en particulier pour ceux vivant des parcours de vie particulier et, pour reprendre l’expression, « pas toujours catholique ».

Ainsi donc, j’ai baigné dans l’univers de Jean-Paul, particulièrement chez les Trinitaires, à Granby, à partir de mes 14 ans.

Dès 1981, je m’ implique au sein de plusieurs de ses œuvres et j’en ai fréquentées plusieurs autres.

Plus tard, devenu adulte, lorsque je serai un artisan des médias, je poursuivrai ma découverte des suites de son travail apostolique.

Concrètement, j’ai été et je suis un témoin.

Chercher, lire, analyser et écrire
J’écris sur ma vie. Pour l’instant, ma démarche est simple et je souhaite qu’elle le demeure : Mon document autobiographique parle avant tout de mon univers personnel et des rencontres que j’ai eu le privilège de faire à titre de journaliste. En peu de mots : Je relate ce que j’ai vécu, lu et entendu au fil des ans.

Inévitablement, puisque son histoire croise la mienne de 1974 à 1988, j’écris sur le père Jean-Paul Regimbal.

En dépouillant le fonds d’archives que j’ai déposé à la Société d’histoire de la Haute-Yamaska autour de l’an 2000 et à l’aide d’anciennes publications retrouvées aux Archives nationales du Québec (les miennes et bien d’autres), je résume - si possible de manière chronologique – tous les documents que je peux consulter.

A la fin du mois de décembre 2023, j’ai retrouvé un petit opus que j’ai écrit en 1998. Il s’appelle « Nul n’est prophète… - Jean-Paul Regimbal et son œuvre ». A cette époque, j’étais responsable des communications de la maison des Trinitaires, à Granby. Ma petite recherche visait à rédiger quelques « trucs » sur le père Trinitaire en vue d’une fête ayant pour but de souligner le 10e anniversaire de son décès. Le texte a servi à la rédaction d’articles qui ont été diffusées dans plusieurs publications et au contenu de l’émission radiophonique « Rencontre spirituelle » a Radio Ville-Marie et a une conférence donnée par Raymond Beaugrand-Champagne, l’animateur de ce rendez-vous quotidien.

Bien entendu, afin d’en faire une analyse sérieuse et y retrouver des inspirations pour ma relecture de vie, je l’ai retranscrit. Durant mes heures de travail devant mon ordinateur – transcrire un long texte est un travail de moine -, j’ai fait de longues intériorisations. Puisque je suis un témoin, j’ai décidé de réécrire le document, d’en tirer les éléments autobiographiques et de poursuivre ce travail de recherche sur Jean-Paul Regimbal en résumant dans le nouveau texte tout ce que j’intercepte en effectuant mon travail autobiographique. En d’autres termes, je garde le focus sur mon premier objectif, mais en parallèle, je traite maintenant les documents en lien avec Jean-Paul en vue de faire une nouvelle petite biographique.

Jean-Paul Regimbal est-il un saint?
Je veux répondre à une question qu’on me pose souvent : Est-ce que Jean-Paul Regimbal est un saint?

Réponse : Je n’en sais rien.

Néanmoins, je me permets quelques commentaires.

Ma première réflexion est que Jean-Paul Regimbal est à regarder avec une pointe d’humour : Sa grande qualité d’émerveillement, son côté émotif (je rappelle que c’est à la base un artiste) et sa tendance à grossir les faits réels me font souvent sourire.

Comme je l’ai écrit, je travaille à résumer ce que j’ai en main à son sujet et à rendre témoignage de ce que j’ai vu, en entendu et vécu auprès de lui, mais j’aimerais bien que des théologiens, des psychologues et d’autres spécialistes scrutent Jean-Paul afin de découvrir d’autres angles de ce qu’il a été et son message humain et spirituel. J’avoue que Jean-Paul Regimbal est un sujet de recherche fort intéressant.

Cependant, sur le plan de religieux, sa grande foi, son intense désir de Dieu, son espérance exemplaire en celui-ci et son grand amour de la Très sainte Trinité et de ses contemporains sont des exemples à imiter.

De plus, les fondements de ses entretiens sur la foi sont d’une grande richesse même si parfois il avance des idées qui ne me plaisent pas ou qui me paraissent farfelues.

Ceux qui comme moi l’ont connu savent ce qui l’animait intérieurement : C’est de vivre totalement de l’esprit biblique, sans tiédeur. Son enseignement a toujours été un appel à faire l’option radicale de Jésus Christ et à entrer dans le mystère trinitaire.

De son côté, le Vatican demande d’être prudents sur le point de l’« officialité » de sa sainteté tant que les démarches d’usage ne seront pas commencées et complétées.

Voici les étapes que Jean-Paul Regimbal aurait à franchir selon la tradition de l’Église catholique :

Dans un premier temps, il faut qu’il y ait une volonté populaire pour que sa cause soit introduite au Vatican et, en second lieu, il y a une somme considérable de renseignements à réunir. Sur ce point, mon travail de recherche-rédaction peut devenir un bon élément de départ.

Enfin, il faut convaincre un des évêques des diocèses ou il a travaillé et habité de reconnaître en Jean-Paul Regimbal une trace de sainteté. Ces évêques sont ceux de Saint-Hyacinthe, de Saint-Jean Longueuil, de Montréal et de Sault Sainte-Marie.

Le diocèse qui présentera sa cause au Vatican devra recueillir toute la documentation possible qui permettra d’écrire une biographie critico-historique pour connaître le religieux dans ses moindres détails, de sa naissance jusqu’à sa mort.

Cette « biographie officielle » sera plus ou moins grosse selon les problèmes rencontrés. Elle aura de 500 à 1000 pages. Peut-être davantage! On appelle cette étude une « positio »

Une fois cette étape franchie, le Vatican s’attardera à la dimension théologique. Ce travail consistera à démontrer que cet homme originaire de l’Ontario a vécu l’Évangile de manière héroïque, c’est-à-dire au-dessus du commun des fidèles.

Quelques années plus tard, des historiens et des théologiens regarderont si le travail a été bien réalisé.

S’il n’y a pas d’obstacles sur la route, un comité de cardinaux scrutera le dossier et le recommandera au pape.

Entre le début et la fin du processus, au moins 15 années se seront écoulées. C’est à ce moment que le pape pourrait donner au père Jean-Paul Regimbal le titre de « vénérable ».

Ainsi nommé, les Catholiques seraient assurés que cet homme de foi est un véritable intercesseur auprès de Dieu. Avec ce titre, le « vénérable Jean-Paul Regimbal » devra tout de même se contenter de la ferveur privée des fidèles.

Pour être considéré comme un « bienheureux », il devra accomplir un miracle certifié par la médecine. Il faut une preuve qui ne laisse aucun doute qu’il est au royaume de Dieu, au paradis. C’est pour cela que l’Église exige un miracle. Le bienheureux Jean-Paul devra en accomplir un second pour être canonisé.

Le titre de « bienheureux » permet à un diocèse ou à une région ou à une congrégation religieuse de vouer un culte public au personnage.

Enfin, la canonisation proposera celui-ci comme un modèle à imiter par l’Église universelle. A ce titre, il aura une place particulière au calendrier liturgique. Habituellement, la fête liturgique coïncide avec la date du décès puisque c’est son entrée dans l’éternité, l’entrée dans la lumière divine.

Ainsi donc, si Jean-Paul Regimbal traverse ce processus, l’Église devrait souligner sa mémoire liturgique le 8 septembre, jour de son « entrée dans la gloire des bienheureux et saints du ciel ».

Autrefois, toute la documentation qui arrivait au Vatican était examinée par l’avocat de la cause qui démontrait l’héroïcité des vertus.

De son côté, le promoteur de la foi (vulgairement appelé « l’avocat du diable ») cherchait dans cette littérature ce qui était négatif. Le candidat était jugé à trois reprises.

Depuis 1983, les règles sont plus souples. Ce sont maintenant des historiens qui font un récit objectif du candidat.

S’il est impossible de répondre à certaines difficultés, a certaines objections, la Congrégation pour la cause des saints peut arrêter ou suspendre la démarche.

Ainsi donc, il est prématuré d’arriver à la conclusion que le père Jean-Paul Regimbal est un saint.

Il est cependant possible, à titre personnel, de croire qu’il est un fidèle intercesseur auprès de Dieu et de l’invoquer dans ses prières intimes. C’est ce qu’on appelle « la communion des saints ».

Pour les croyants, les défunts ne sont jamais morts, ils sont auprès de Dieu. La profession de foi des Catholiques qui est proclamée d’une semaine à l’autre dans les célébrations eucharistiques fait référence à cela.

Ainsi donc, si on a foi au Dieu révélé par Jésus le nazaréen, on peut aussi inscrire la date du 8 septembre dans son agenda personnel afin de perpétuer sa mémoire.

Et en tout temps, on peut aller se recueillir sur sa dépouille au cimetière Saint-Antoine, à Longueuil, situé à quelques pas de la cathédrale du diocèse de Saint-Jean-Longueuil ou repose la bienheureuse Marie-Rose Durocher.

Une note : Le 29 mai 1998, a l’occasion d’une rencontre informelle a son bureau, à Montréal, le supérieur provincial des Trinitaires au Canada de l’époque, le regretté père Sylvio Michaud, m’a demandé d’être très prudent dans ma démarche de recherche, d’analyse et de rédaction parce que la sainteté de Jean-Paul Regimbal n’est pas encore reconnue par le Vatican. Bien entendu, je l’ai assuré être en accord avec lui et que ma démarche est d’ordre historique.

Je le pense vraiment : un Catholique qui veut vivre en communion avec la grande Église, respectera cela et, dans son discours, en fera référence. Élever Regimbal a la gloire des saints avant que la sérieuse enquête soit terminée, pourrait nuire au processus.

A mes yeux, la démarche d’enquête du Vatican est un acte de grande sagesse afin de ne pas présenter au calendrier des saints des personnes qui ne sont pas de vrais modèles.

C’est déjà arrivé qu’on ait dû retirer des saints du calendrier. Rapidement, il me vient à l’esprit les cas de saint Christophe et saint Alexis qui, en réalité, n’ont jamais existés.

En janvier 2024, il y a eu aussi l’histoire de la mystique italienne Luisa Piccaretta dont la béatification a été refusé par le Vatican.

Les difficultés relevées dans ses écrits étaient de nature à la fois…

a) Théologique : une conception de la divine Volonté trop mécanique et obsessionnelle ne semblant pas laisser à l’humain la possibilité d’exercer son libre arbitre;

b) Christologique : une doctrine de la réparation et de la spiritualité « victimale » n’intégrant pas le primat de l’amour miséricordieux, immérité et inconditionnel de Dieu et risquant d’annuler ou relativiser l’offrande libre et gratuite du Rédempteur;

c) Et, anthropologique : une spiritualité marquée par un pessimisme sur la nature humaine avec peu de références à la résurrection du Christ, à l’espérance chrétienne, à la grâce sanctifiante, à la bonté de la création et à la communion ecclésiale.

Appel à l’aide

Vous avez en main des documents à mon sujet ou au sujet du père Jean-Paul Regimbal (enregistrements audio et vidéo, correspondance, articles journalistiques, photographies, etc.) ? J’aimerais beaucoup en prendre connaissance. Tous documents que vous me donnerez (ou les copies) seront déposés à la Société d’histoire de la Haute-Yamaska afin que les futures générations se souviennent de l’homme qu’il a été. Ces documents seront conservés dans les meilleures conditions archivistique qui soit et resteront disponible aux chercheurs.

ARTICLE DU JOUR: Jean-Paul Regimbal, celui qui a été un passionné de Dieu

Jean-Paul Regimbal


« Celui qui a été un passionné de Dieu »
Par Benoit Voyer

7 septembre 2025

Pendant quatre ans, c’est-à-dire à partir depuis juin 1984, année où il est opéré à « cœur ouvert » de toute urgence, Jean-Paul Regimbal en arrache avec sa santé. Il a des hauts et des bas, mais il n’est jamais assez bien pour reprendre le rythme de ses activités de la précédente décennie. C’est un vrai purgatoire pour lui. Les vieux catholiques diraient que c’est un temps de mortification qu’il traverse.

Bien entendu, à Rome, il travaille comme il peut, avec le père Armand Gagné, à la cause des chrétiens persécutés, mais étant souvent hospitalisé pour son asthme et divers petits bobos, c’est bien plus dans l’offrande de sa maladie à son Dieu qu’il lutte contre les persécutions religieuses.

Je l’entends encore dire, lors d’une conférence donnée entre 1981 et 1984 : « un jour, le renouveau charismatique passera et fera place à un renouveau mystique ». N’est-ce pas ce qu’il est en train lui-même d’expérimenter?

A l’été 1988, Jean-Paul est hospitalisé à nouveau. Cette fois-ci, il fait un séjour dans le milieu hospitalier sherbrookois.

C’est par l’intermédiaire de ses confrères qu’il sera informé de la canonisation de Simon de Rojas, un prêtre trinitaire espagnol, né le 28 octobre 1552 et mort le 29 septembre 1624, dont il a tant parlé depuis son entrée dans l’Ordre religieux, en 1949. La grande célébration a lieu le 3 juillet 1988, sur la Place Saint-Pierre.

Au Stade olympique de Montréal en 1977
Regain d’énergie

A la fin de l’été 1988, le père Jean-Paul Regimbal se sent bien. Il reprend quelques activités dans le but de reprendre son ministère comme il le faisait avant l’épreuve de la maladie. Il souhaite recommencer à animer des ressourcements spirituels.

Les mardis 30 aout et 6 septembre 1988, en soirée, il anime l’heure de prière devant le saint-sacrement dans la chapelle de la maison des Trinitaires, à Granby.

Entre temps, le 5 septembre 1988, il se joint au groupe de prière charismatique qu’il a fondé en 1970, afin de prier avec les gens. Il préside la messe du jour.

Mes parents sont présents. Ils sont très heureux de le revoir. Ils me reparleront souvent de cette joie. C’est comme si leur frère de sang était revenu pour un repas de famille ou pour veiller au salon avec eux.

Malheureusement, Jean-Paul n’est pas encore vraiment prêt physiquement au rythme de travail qu’il veut s’imposer. Il s’épuise rapidement. D’ailleurs, le père Claude Choquet, son supérieur, l’invite à ralentir un peu ses activités. Jean-Paul lui répond par une boutade : « Quand je serai mort, je ne travaillerai plus ».

Le 7 septembre 1988, Jean-Paul se rend au Centre hospitalier de Granby pour un léger malaise. Les médecins le garde sous observation pour quelques heures.

En cette matinée du 8 septembre 1988, Jean-Paul Regimbal se sent mieux et croit qu’il pourra sortir du Centre hospitalier de Granby en après-midi ou le lendemain afin de poursuivre son ministère sacerdotal.

Vers 11h, Léon-Pierre Étier le visite. « Je vais sortir cet après-midi », lui dit-il.

Finalement, il passe la soirée de ce jeudi dans sa chambre avec quelques proches et amis.

Le père Choquet est du nombre. Jean-Paul lui paraît calme et heureux. Il lui dit qu’il sera à la maison de retraites spirituelles pour célébrer la messe du dimanche.

Mon père est son dernier visiteur. Ils échangent. Jean-Paul donne un conseil de vie spirituelle à papa : « Roméo, continues de croire et d’aimer l’Eucharistie! ». Ce seront ses dernières paroles avant les salutations d’usage.

A ce moment, personne ne sait ce que prépare la Vierge de la Nativité. « La visite partie », Jean-Paul Regimbal reçoit fort probablement la visite du personnel infirmier, prie, se couche pour la nuit, s’endort et son âme quitte son corps. Il passe des ténèbres a la lumière. Par la main, Marie le conduit à son Fils. Il a 57 ans.

En revoyant en un éclair le fil de sa vie dans la l’intense lumière du dernier souffle, il a dû se souvenir de ce qu’il écrivait en 1958 : « Nous sommes tous en marche vers l’éternelle patrie et notre court passage sur la terre n’a d’autre fin que de nous préparer le plus parfaitement possible à notre occupation céleste : connaitre, aimer et servir Dieu à jamais. »

Humainement parlant, vers 22h45, Jean-Paul Regimbal décède, en douceur, d’une défaillance cardiaque.

Durant ce temps à la télévision française de Radio-Canada, « Le Point » présente la deuxième partie d’un reportage baptisé « Les Palestiniens » qui témoignent de leurs vies, de leurs aspirations et du sens de leurs luttes dans les territoires occupés où se multiplient les affrontements quotidiens avec l’armée israélienne ». Voilà un dossier qu’aurait apprécié Jean-Paul, lui qui était préoccupé par cette question d’actualité.

Derniers hommages

La nouvelle de son décès circule rapidement dans les chaumières granbyennes et puis partout au Canada francophone. Je suis très affecté par son départ. En secret, je verse des larmes. J’espérais tant le revoir pour avoir quelques conseils. Papa et maman sont sans mots. Je les ai rarement vus si tristes.

Sa dépouille est exposée les samedi et dimanche, 10 et 11 septembre 1988, dans la grande salle des retraites spirituelles de la maison des Trinitaires, à Granby, salle qu’il a fait construite dix ans plus tôt. Les visites sont de 10h à 22h. C’est la Maison funéraire Girardot et Ménard qui s’occupe de la direction des funérailles.

Plusieurs centaines de personnes viennent lui rendre un dernier hommage. Bien entendu, je suis du nombre. J’y passe quelques heures. Mes parents font de même.

Plusieurs congrégations religieuses envoient un représentant afin de remettre un message de condoléances à sa famille et à ses confrères.

Sur la photographie publiée dans le quotidien La Voix de l’Est du 12 septembre 1988, il est possible de reconnaître le père trinitaire Yvon Samson, Sœur Jacqueline Lacroix, Jocelyne et Yves L’Étoile. J’étais à quelques pas lors du passage du journaliste.

Funérailles

Le 12 septembre 1988, à 14h, on célèbre les funérailles de Jean-Paul Regimbal. En cette superbe journée ensoleillée, l’église Sainte-Famille, rue la rue Principale, à Granby, est pleine à craquer. Bien entendu, je suis présent. Je suis debout à l’arrière de l’église, car je ne peux pas rester jusqu’à la fin puisque je suis attendu à 16h à l’usine de tapis Peeters pour une soirée de boulot.

La messe funéraire est présidée par Mgr Louis Langevin, évêque de Saint-Hyacinthe. Dans son homélie qui m’ennuie, il commente les lectures bibliques de la messe, résume en très peu de mots la vie de Jean-Paul Regimbal et lui adresse quelques humbles éloges :

« Le père Jean-Paul […] Conscient que Jésus Christ s’identifie à celui qui souffre, a celui qui est malade, dépouillé, prisonnier, détenu, il […] a eu le souci d’aider ces blessés de la vie. Il a été l’apôtre de la miséricorde.

Combien de personnes il a reçu et qui sont ressorties encouragées, stimulées et converties par l’Esprit saint qui agit en nous, qui habite en nous? […]

[Et puis, il] a lancé ce grand mouvement du renouveau charismatique au Canada. Il en fut un apôtre donné, avec ses limites, bien sûr, comme tout le monde, mais ses limites ne doivent pas nous empêcher de voir le bien qu’il a fait. Il a mis toutes ses énergies à faire connaitre ce mouvement et faire prendre conscience du rôle central de l’Esprit saint dans la vie de l’Église. […]

Le père Jean-Paul a été aussi l’apôtre de la Parole de Dieu, c’est-à-dire un évangélisateur. Il avait cette passion de faire connaitre la Parole de Dieu pour que les baptisés en vivent vraiment. Sa voix chaude et claire a retenti un peu partout et nous lui en sommes reconnaissants profondément. […]

C’est son amour de l’Église qui a poussé le père Jean-Paul à dépenser beaucoup d’énergies pour le renouveau charismatique. Le père Jean-Paul a aimé l’Église. Il a aimé le pape et les évêques. Je peux l’affirmer l’ayant connu et l’ayant vu travailler dans le diocèse et ailleurs. […]

Le père Jean-Paul a été un bon religieux trinitaire; il aimait sa communauté et ses confrères, il a été un bon prêtre, fidèle à son sacerdoce et a ses engagements.

Le père Jean-Paul est parti avec la conviction que ce fut pour lui une grande grâce d’avoir été appelé au sacerdoce et que cette grâce lui a apporté beaucoup de bonheur. […]

Que le Seigneur ressuscité daigne accueillir celui qui a été un passionné de Dieu. […] Nous ne verrons plus le père Jean-Paul! Nous n’allons plus l’entendre! Il vient de nous devancer pour rejoindre ceux et celles qui nous ont quittés. »

Le journaliste Daniel Paquette de la Voix de l’Est écrira le lendemain dans les pages du journal :

« Étonnamment, la messe s’est déroulée sobrement. Pas de bras levés vers le ciel, pas de prière spontanée, pas de chants en langue, pas d’imposition des mains, toutes ces manifestations extérieures habituelles aux charismatiques ont fait place à des larmes discrètes et a une participation intense aux chants et à la liturgie mortuaire ».

« A la sortie du cercueil de l’église, la foule a applaudi, quoique brièvement, le père Regimbal en hommage.

Une bonne centaine de disciples sont venus toucher de la main le cercueil pour y prier et se recueillir avant que celui-ci soit poussé à l’intérieur du corbillard. Pendant ce temps, au loin, les cloches de l’église Notre-Dame, la paroisse voisine, volaient dans le ciel de Granby.

La famille du défunt occupait quatre rangées derrière les pères trinitaires et plusieurs curés de paroisses de la région avaient revêtu l’aube. De plus, de nombreuses personnalités assistaient à la messe funéraire dont MM. Jean Lapierre et Roger Paré députés fédéral et provincial de Shefford, et MM. Mario Girard et Horace Boivin, respectivement maire et directeur des relations publiques de Granby ».

Après la célébration, la dépouille de Jean-Paul Regimbal est conduite au cimetière des Trinitaires, a Saint-Bruno-de-Montarville. Plusieurs années plus tard, sa dépouille , comme celles de ses confrères et consœurs, déménagera dans une section du Cimetière Saint-Antoine-de-Padoue, à Longueuil. Dans la dernière rangée du cimetière, un petit et humble obélisque ou figure son nom est déposé par-dessus les quelques mètres qui le sépare de notre existence. Il est au royaume des morts, mais il demeure un éternel vivant dans le cœur de Dieu.

Lieu d'inhumation du père Jean-Paul Regimbal dans le Cimetière Saint-Antoine-de-Padoue, a Longueuil

ARTICLE DU JOUR: L’avenir du renouveau charismatique


L’avenir du renouveau charismatique

Par Benoit Voyer

7 septembre 2025

Pour Jean-Paul Regimbal, les œuvres tout comme les communautés religieuses sont des organisations temporaires qui répondent à un besoin du moment. Lorsque le besoin n’est plus présent, il ne faut pas s’attarder à les maintenir en vie. Il faut passer à autre chose. En fait, il faut répondre aux besoins de son temps. Il faut être à l’écoute des signes de l’Esprit saint.

Il pensait un peu la même chose du renouveau charismatique. D’ailleurs, il n’aimait pas lorsqu’on parlait du mouvement charismatique, comme si c’était un autre regroupement pastoral de l’Église. Pour lui, le renouveau en question, s’inscrit dans la réponse à la prière du pape Jean XXIII pour le Concile Vatican II, à l’automne 1962 : « Renouvelle tes merveilles en notre temps, comme par une nouvelle Pentecôte. Accorde à ton Église d’être, d’un même cœur, assidue à la prière de Marie, mère de Jésus, et sous la conduite du bienheureux Pierre, afin que puisse advenir le règne de notre Divin Sauveur, règne de vérité et de justice, règne d’amour et de paix. »

En 1979, dans ‘Selon la parole”, il discerne quelques grandes tendances qui se préciseront dans l'avenir [1]:

1-Tendance communautaire de plus en plus marquée selon des formes non prévues par le droit canon de l'Église et nos normes classiques d'évaluation.

2-Une grande vague mystique suivra la vague charismatique que nous connaissons présentement.

3- L'œcuménisme va franchir des bonds plus prodigieux dans les 25 prochaines années que durant les 75 dernières.

4- Des formes nouvelles d'engagement sacerdotal et de ministères pastoraux vont surgir dans l'Église, notamment au cœur de la masse ouvrière et au sein du mois insolite de ce que plusieurs appellent ‘les marginaux”.

En 1981 ou 1982, dans une conférence qu’il donnait à la maison de ressourcements spirituels des Trinitaires, à Granby, a laquelle j’assistais, le père Jean-Paul disait que le renouveau charismatique allait éventuellement céder sa place à un renouveau mystique au sein de l’Église. Il entrevoyait l’émergence d’une nouvelle génération de saints et saintes.

Alors, le renouveau charismatique initiée pat Jean-Paul Regimbal n’était pas là pour rester. Il répondait à un besoin de son époque et s’inscrivait dans la suite du Concile Vatican II. Mais comme on dit : l’Esprit saint souffle ou il veut et comme il veut. L’expérience spirituelle intense qui a déferlée à l’époque du Trinitaire pourrait ressurgir a tout instant.

____________________

[1] Cité dans : La Presse canadienne. Le renouveau charismatique promis à un avenir? Le Quotidien, 7 février 1979, p. D1

LONGUEUIL: Visite au lieu de sépulture du père Jean-Paul Regimbal


Benoit Voyer en visite a la tombe du père Jean Paul Regimbal, au Cimetière Saint-Antoine-de-Padoue, a Longueuil, le 6 septembre 2025, a l'occasion de son 37e anniversaire de décès survenu le 8 septembre 1988, a Granby.

PAROLE DE Jean-Paul Regimbal


JEAN-PAUL REGIMBAL: Nous pouvons avoir une grande force comme groupe de pression


Le Père Regimbal dénonce une conspiration du silence


Nous pouvons avoir une grande force comme groupe de pression

Par Gérard Tremblay


GRANBY - Pour le père Jean-Paul Regimbal, O.ss.t., initiateur du mouvement charismatique au Québec, le Renouveau charismatique n'est pas le fruit d'une génération spontanée, mais plutôt le résultat d'un mouvement qui s’est manifesté au sein de l’Église depuis de nombreuses années.

Alors qu'il était le conférencier invité au déjeuner-causerie de l'Amicale des anciens élèves des Frères du Sacré-Cœur, dimanche, le curé de Monplaisant a expliqué qu'on retrouve les racines de l'actuel mouvement à la fin du siècle dernier. ‘’L'encyclique de Léon XIII, dit-il, annonçait déjà ce qui allait survenir, d'autant plus que le saint pape, en 1899, avait consacré le XXe siècle à l'Esprit Saint.”

Plus près de nous. Vatican II avait, pendant cinq ans, sollicité une manifestation spéciale de l'Esprit, manifestation spéciale qui consiste, pour le Père Regimbal, en l'effusion de l'Esprit-Saint, dans le don des langues et dans l'évangélisation. Trois caractéristiques, selon lui, qu'on pouvait reconnaître chez les apôtres.

Dans un rappel historique, il a indiqué que ces premières manifestations étaient survenues aux Etats-Unis en 1967. “J'ai moi-même, dit-il, reçu l'effusion de l'Esprit-Saint le 11 septembre 1969, à 11 heures 15.”

Le Père Regimbal a depuis lors prêché dans 53 pays, en plus de mettre sur pied, à Granby même, trois mouvements aux buts bien spécifiques à l'intérieur du renouveau charismatique: l'Eau vive, qui se veut une école de formation pour les responsables des groupes de prière, Témoignage-jeunesse, un centre de formation des jeunes en vue de l'évangélisation d'autres jeunes, et l'Association Chrétien Témoin dans l'Entreprise ( ACTE), pour permettre aux chrétiens d'assurer leur rôle apostolique dans leur milieu de travail. “Les laïcs, a-t-il précisé, sentent de plus en plus leur responsabilité dans l'Église.

Conspiration du silence
Parlant de la récente intervention de Jean-Paul Il devant l'ONU, le conférencier a souligné que le pape n'avait pas seulement parlé le langage de l'évangile, mais aussi le langage de l'homme. Or, a-t-il poursuivi, pas de commentaires, pas d'analyse sérieuse n'ont suivi son allocution. Il y eut une conspiration du silence, et il est de notre devoir de remédier à la situation dans la mesure de nos moyens. Rappelant que ce n'était pas en servant des blâmes, mais plutôt en prenant nos responsabilités qu'il est possible de contribuer à l'avènement de la Société de l'amour. Le Père Regimbal a conclu en disant: « Dans la démocratie où nous avons encore la chance de vivre, nous pouvons avoir une grande force, comme groupe de pression pour forcer les médias à fournir une information adéquate sur les vrais problèmes de l'heure, tout comme sur nos gouvernants pour qu'ils prennent les mesures nécessaires pour contribuer à leur solution. »

(La Voix de l’Est, 12 novembre 1979, p. 3)

LE BALADO: La spiritualité chrétienne devant la modernité


NATURE


La Réserve naturelle Marie-France-Pelletier, a Joliette

PARTI CONSERVATEUR DU QUÉBEC: Entretien avec Ange Claude Bigilimana (3) - En rappel