Mgr Raymond Saint-Gelais, l'évêque des gens ordinaires
L'évêque de Nicolet est de cette nouvelle race d'évêque qui ne s'attache pas au prestige que procure le titre de sa fonction. Il veut demeurer le simple pasteur qui garde le contact avec les gens ordinaires. Il ne manque pas une occasion d'être une présence de Dieu au cœur des débats de la société et auprès des marginaux de son diocèse.
"J'ai la conviction que le leader d'aujourd'hui et de demain est quelqu'un qui chemine avec les gens, plutôt que d'imposer son propre point de vue" a-t-il dit en interview à Image de la Mauricie.
Que ce soit pour défendre les droits des personnes âgées ou pour partager, la bière à la main, avec un individu au fond d'un bar, il refuse rarement un rendez-vous pour témoigner de ce feu qui habite en lui.
Raymond Saint-Gelais ne veut pas dire seulement de belles paroles qui ne toucheraient guère les gens. Il veut se faire solidaire des exclus, car, pour lui, la foi sans les œuvres est une foi morte.
Il le dira à plusieurs reprises en entretien, son désir est de montrer le visage humain de son Église, un visage qui ressemble à celui du Christ. C'est d'ailleurs l'objectif visé par la priorité diocésaine de Nicolet. Une priorité qui lui colle à la peau.
Un évêque à la brasserie
Une de ses actions pour se rapprocher du "vrai monde", c'est la visite des bars qu'il fait un peu avant Noël. Il apprécie ces rencontres. C'est sa façon de faire sentir combien il aime et veut écouter chaque personne.
Il se souvient d'un jeune d'environ 25 ans qui a attendu sa visite dans une brasserie de Gentilly pendant au moins deux heures. L'homme a placoté avec l'évêque pendant trente minutes et aurait aimé que la discussion se poursuive toute la nuit.
Un autre lui disait: "Il est peut-être tard pour venir nous visiter, mais continuez, vous risquez de m'avoir."
Sa façon de voir les distants de l'Église se rapproche des propos de l'auteur français Olivier Legendre dans son livre "Le cri de Dieu" publié aux Éditions Anne Sigier : "Il y a des incroyants qui sont plus croyants que certains croyants". Une façon de dire qu'il ne porte pas de jugements sur ces personnes qu'il considère comme ses propres frères et sœurs.
Autres actions
Le 11 février dernier, à l'occasion du dimanche des malades, il a célébré une messe au Foyer de Nicolet qui est menacé de déménagement. Dans son homélie, il a lancé un plaidoyer en faveur de la survie de ce centre pour les aînés et pour celle de l'hôpital de Nicolet. Son message a eu des échos.
La liste de ses positions publiques est longue. Un peu avant Noël, il a accueilli à son bureau des femmes à la tête de familles monoparentales. Quelques jours plus tard, à l'invitation du restaurant Chez Théo, il a joint, pour une seconde fois, ces femmes dans le cadre d'un déjeuner aux frais du restaurateur. Dernièrement, il a participé à une assemblée publique portant sur la reconfiguration des établissements de soins de la santé et à une autre sur l'avenir économique du "Grand Nicolet." Qu'importe l'occasion, il ne veut pas de places d'honneur. Sa seule ambition est de faire entendre sa voix au milieu des autres.
Un nouveau Mgr Gaillot?
"Êtes-vous un nouveau Mgr Jacques Gaillot?" a osé lui demander promptement notre journaliste. "Chaque évêque a sa personnalité", a-t-il rétorqué. "L'intention que j’aie n'est pas de jouer à la vedette. je ne dis pas que Mgr Gaillot le fait. Je veux simplement être pasteur dans l'Église de Nicolet."
Raymond Saint-Gelais continuera de prendre encore la défense des plus défavorisés de sa région. Le diocèse de Nicolet est un territoire à l'économie fragile. La reconfiguration des services de la santé, en exemple, risque de faire perdre de nombreux emplois.
Benoit Voyer
(Texte proposé a Image de la Mauricie pour l’édition d’avril 1996)