2 novembre 2025

EN BREF


ÉLECTION MUNICIPALE :
comme dans bien des municipalités du Québec, il y a eu des élections à Sainte-Julienne, dans la région de Lanaudière. Vers 16 h 30, je suis allé exercer mon devoir démocratique à l’école secondaire Havre-Jeunesse.

Depuis plusieurs semaines, on me demandait pour qui j’allais voter. Je dois vous avouer que depuis que j’ai l’âge de pouvoir voter, c’est la première fois que je suis embêté devant un choix à faire. Depuis quelques jours, j’ai pensé à la difficulté qu’ont eue les femmes à pouvoir voter et à devenir des candidates. Je me suis dit : « Pourquoi pas un vote rose ? Ça apportera assurément une nouvelle dynamique à la mairie de Sainte-Julienne. » C'est ce que j’ai décidé de faire. Mon vote est donc allé à Cathie Audet à la mairie et à Sylvie Isabelle pour le district no 5, où j’habite. Pour ce qui est du préfet de la MRC de Montcalm, j’ai décidé d’appuyer Gilles Dubé. À mes yeux, du sang neuf ne peut faire que du bien.

Au moment d’aller au lit, je ne connaissais pas encore les résultats du vote. À 22 h 10, les résultats du vote à Sainte-Julienne étaient encore partiels. Qu’importe qui sera élu, mes félicitations à l’avance.


J’en profite pour féliciter Annie Desrochers et son équipe a la Première chaine de Radio-Canada pour la qualité de leur émission spéciale.

INTERMEDE: Le Parc national de la Yamaska

 


CULTURE CLASSIQUE: L’Harmonie des saisons fête ses 15 ans


L’Harmonie des saisons fête ses 15 ans

Par Benoit Voyer

2 novembre 2025

C’est en 2010 qu’est née l’ensemble de musique ancienne L’Harmonie des saisons. Il a été fondé par la multi-instrumentiste Mélisande Corriveau et le claveciniste Eric Milnes. Tous deux dirigent la troupe à titre de directrice artistique et de directeur musical.

Mélisande Corriveau et Eric Milnes
L’Harmonie des saisons se produit habituellement à l’abbaye de Saint-Benoit-du-Lac. En novembre et décembre 2025, on sort de la routine. Pour souligner son 15ᵉ anniversaire, il donne trois spectacles à Granby, au Québec, lieu de leur fondation, et à Saint Albans et Burlington dans l’État du Vermont. Pour l’occasion, ils interprètent le Requiem de Mozart.

Récipiendaire de deux prix JUNO et de deux prix OPUS, « L’Harmonie des saisons » a endisqué trois disques chez Atma Classique, en 2015, 2020 et 2022.

Tous les musiciens possèdent une solide formation musicale et jouent sur des instruments d’époque.

La musique est disponible sur YouTube Music :
https://music.youtube.com/channel/UCf1ONARby414MN8WgS3rbug

LE BALADO: Jean-Paul Regimbal (6)


PAROLE DE René Lévesque

 


NATURE: Le Centre d'interprétation de la nature du Lac Boivin, a Granby


IL FAIT TOUJOURS BEAU QUELQUE PART: Aalyia


JEAN-PAUL REGIMBAL: Rock possédé du démon


Rock possédé du démon

Par Richard Sirois


Un professeur de l’Université Laval affirme que le rock a une grande valeur incantatoire! Un médecin de Granby accuse le rock’n’roll de lui avoir pris ses deux fils! Une religieuse fracasse des disques dans une station de radio de Fort Coulonge! L’Association des consommateurs du Québec est sur les dents et se dit préoccupée par la présence de messages subliminaux sur les albums rock! Un ex-commis de banque de Montréal croit qu’une influence maléfique se cache derrière les grands noms du HEAVY METAL! Au banc des accusés: le Prince des Ténèbres. Le diable nous ferait-il chanter?

Le quatrième étage du Pavillon Casault de l’université Laval. Urbain Blanchet, musicologue, est confortablement assis derrière son bureau. Devant lui, des partitions classiques se mêlent aux plus récentes revues rock internationales. Ce spécialiste de l’histoire de la musique peut vous parler du rock’n’roll pendant des heures. Il connait Ozzy Osbourne, Black Sabbath et Kiss sur le bout de ses doigts. Depuis la belle époque d’Elvis Presley, ce docteur en littérature s’amuse à décoder les œuvres des géants de la musique pop. « Je ne mets pas tout le rock à l’index, dit-il, mais je condamne en bloc le heavy metal à cause des valeurs spirituelles et humanitaires mises en cause ». Il ajoute que cette forme musicale prône la révolte sous toutes ses formes et rappelle que les stars du rock sont des modèles et des héros qu’imitent les jeunes dans leur quête d’identité. « Pour les consommateurs de cette musique qui ont entre 12 et 16 ans, cela devient un phénomène social inquiétant », affirme-t-il. « On se penche beaucoup sur [manque quelques mots].

[Ce] dernier s’est donné la mort pour fêter l’anniversaire du suicide de son copain... avait demandé qu’on fasse jouer Stairway to Heaven à ses funérailles. Normand Rainville est médecin à Granby. Il affirme que ses deux fils de 16 et 19 ans se sont suicidés (à cinq mois d’intervalle) à cause de leur passion pour la musique du groupe Black Sabbath. Il en a parlé avec Pierre Pascau sur les ondes de CKAC et dit avoir mal été compris. De plus, en novembre dernier, l’hebdomadaire Allô-Police reprenait en long et en large (et en première page!) son entrevue à la radio. Il en garde un goût amer. Depuis quelques temps, il hésite à faire des déclarations sur le sujet et se méfie des journalistes. Avec quelques autres personnes, il a fondé le Centre de Recherches Interdisciplinaires St-Luc dont l’objectif est « d’opérer un certain discernement dans les valeurs proposées en cette fin de XXe siècle ». « Pour plus d’informations, me dit-il, entrez en contact avec Alain Lamothe ».

La ville de Fort-Coulonge est située à 100 km au nord d’Ottawa. Et là, le diable est le sujet d’actualité numéro 1. En novembre dernier, une religieuse fut invitée par la gérante de la station communautaire de l’endroit (CH1P-FM) à « éliminer » les disques contenant des messages soi-disant «sataniques». Une douzaine d'albums furent fracassés avant que les autres employés de la station aient pu intervenir. Sœur Dolorès (la religieuse en question) affirme avoir fait « son choix de disques » à partir de deux livres écrits sur le sujet: « Le rock'n’roll: viol de la conscience par les messages subliminaux », du père Jean-Paul Regimbal, et « La musique rock: divertissement ou medium...? » d’Alain Lamothe. L’incident a fait beaucoup de bruit, entraînant même la démission de la gérante. Actuellement, un groupe de pression veut empêcher la diffusion sur les ondes de certains albums rock. John Evans, gérant « par intérim » croit que cela créerait un dangereux précédent. Il me confirme cependant que « le conseil d’administration est disposé à entendre des objections publiques concernant la diffusion de musique rock si quelqu’un organise une rencontre.

Maryse Azzaria habite en banlieue de Québec. Pas de séances d’exorcisme en vue dans son sous-sol. Cette mère de famille résolument progressiste est bénévole à l’Association des Consommateurs du Québec (ACQ). Tout ce qui touche à la manipulation des individus l’intéresse. Elle a suivi de près l’affaire des expériences secrètes sur le lavage de cerveaux que la CIA a effectuées sur les patients de l’institut Allan Memorial de Montréal, vers la fin des années 50. Elle fait actuellement partie d’un comité qui étudie la question des messages subliminaux insérés sur les disques rock.

Elle explique que « le terme subliminal indique que le message n’est pas perçu directement, c’est-à-dire qu’il est perçu sous le seuil de la conscience. Certaines études laissent à penser que des suggestions auditives sous le seuil de la conscience peuvent provoquer des réactions physiologiques ».

Les groupes religieux ont été les premiers à dénoncer ces pratiques affirmant qu’on y retrouve une volonté bien établie « de pervertir la conscience des jeunes ». À l’ACQ, ajoute Maryse Azzaria, « il ne s’agit pas de débattre un problème religieux mais bien de défendre les intérêts des jeunes consommateurs. L’association s’est toujours intéressée aux valeurs véhiculées par les objets. Elle s’inquiète maintenant des effets que véhiculent un certain type de musique rock. Finalement, l’ACQ estime que les messages subliminaux inversés «peuvent inciter les jeunes à adopter des comportements possiblement contraires à leur valeur ». Maryse Azzaria se sent d’autant plus concernée par le sujet qu’elle a cinq enfants âgés entre 12 et 19 ans. Un jour, sa fille de quinze ans (tannée d’entendre parler de ces messages cachés?) décide de prendre des cours de guitare. Le soir venu, elle revient chez elle après avoir appris les premières mesures de Stairway to Heaven.

Fin février. Salle communautaire de l’Église Saint-Pierre à Fort-Coulonge. L’endroit est plein à craquer. Une équipe complète de Radio-Canada (Ottawa) est sur les lieux. Alain Lamothe ajuste son projecteur diapo, son magnétophone et son micro. Devant lui, près de 400 personnes qui attendent le début de sa conférence intitulée « La musique rock: divertissement ou medium...? La projection sera suivie d’un débat public sur la question. Dans l’assistance, on retrouve le docteur Normand Rainville et Sœur Dolorès.

Alain Lamothe est un ex-commis de banque qui consacre son temps et ses économies à démasquer Lucifer dans les disques, textes et spectacles rock. Son emploi du temps est chargé. Une conférence par jour depuis quelques semaines « Le sujet est à la mode de ces temps-ci », dit-il. Lui, il en parle depuis 6 ans. Sa spécialité: Le backward masking process ou si vous préférez, les messages subliminaux inversés et cachés.

Dans la salle, l’obscurité se fait, la projection commence. Tête de mort, musique d’enterrement, Beatles, Charles Manson (l'assassin de l’actrice Sharon Tatc), Led Zeppelin, Aleister Crowley (célèbre Ie sataniste Anglais), Eagles, Anton Lavey (grand prêtre de l'Église de Satan en Californie) se succèdent pêle-mêle et à vive allure sur l’écran. Alain Lamothe se met à décoder l’un des plus grands succès du rock: Stairway to heaven. Lorsque l’on a la possibilité d’écouter cette pièce en marche arrière on peut entendre (plutôt mal que bien) les phrases Because I know they've got to leavefor Satan et Here's to my sweet Satan. C’est ce qu’Alain Lamothe appelle un message subliminal inversé et caché! L’auditoire est conquis. Enfin la preuve que tous attendaient. Le rock et le diable ne font qu’un. Fier de son coup, Lamothe I ajoute « on croit maintenant que cette chanson, par une écoute répétée, peut avoir des conséquences suicidaires sur l’auditeur! ». C’est la millième fois qu’il répète cette phrase. C’est la millième fois qu’il entend cette chanson et il ne semble pas se porter trop mal. Ses affaires non plus. Cet ex-employé de banque vise une réimpression de son volume qui porte le même titre que sa conférence (les 3000 premiers exemplaires se sont envolés assez rapidement). Il aimerait faire traduire le bouquin et la conférence (75$ par présentation) pour conquérir le marché américain. L’expert du backward masking process, c’est lui!

Une nouvelle chasse aux sorcières?


Les rock stars d’hier gonflaient d’immenses pyramides à l’hélium (Pink Floyd) et faisaient virevolter leurs pianos dans les airs (Emerson, Lake & Palmer). Celles d’aujourd’hui accaparent les symboles les plus naïfs de l’ésotérisme (la tête de bouc, les chiffres 666, etc.) et jouent à faire peur aux adolescents. À l'autre extrémité, des groupes religieux intégristes pratiquent une véritable « pédagogie de la terreur » et utilisent le rock pour imposer leur vision du monde. Aux États-Unis, le phénomène ressemble à une véritable chasse aux sorcières. Dans le courant de la Moral Majority du Révérend Jerry Falwell des pasteurs traversent les États américains pour convaincre les jeunes de se débarrasser de leur musique rock. C’est le cas des frères Steve et Jim Peters du Minnesota qui sont convaincus que le rock'n’roll est l'une des plus grandes forces sataniques du pays. Lors de leur premier « séminaire rock » tenu en 1979, plus de 150 jeunes ont jeté au feu quelques 15 000 dollars de disques. Les frères Peters n’acceptent pas qu’on les qualifie de fanatiques. « Certains considèrent que Jésus lui-même était un fanatique », ont-ils répondu à un journaliste du Rolling Stone qui leur faisait la remarque. Ils considèrent que le mode de vie, les paroles, les intentions et les pochettes de disques des vedettes de rock sont « perverses, immorales et corrompues ». Leurs cibles principales sont les groupes Kiss, Eagles, Beatles, Rolling Stones et Led Zeppelin. Jusqu’à maintenant, ils ont laissé dans leur sillage plusieurs milliers de cassettes qu’ils vendent 8 dollars pièce.

L’évangéliste Alton Garrison, de son côté, tente de convaincre les adolescents de détruire leurs albums de musique rock au cours de « Rallye de destruction de ces voix du diable ». « Je ne souhaite pas de mal à Mick Jagger des Rolling Stones, mais je souhaite que par la grâce de Dieu il puisse sauver sa vie », dit-il. Certains l’accusent d’employer les mêmes méthodes que ceux qu’il dénonce, c’est-à-dire de faire du show business. Ses discours se font au son d’une émouvante musique religieuse et sont ponctués de « Alléluia », « Amen » et « Prions le Seigneur », sans oublier les exhortations à acheter sa série de cassettes au prix de 25$. Il clôture ces cérémonies en demandant aux jeunes de venir empiler sur l’estrade leurs albums de « musique diabolique ».

Un certain Joseph Matt, auteur d’une brochure intitulée « Le rock’n’roll, instrument de révolution et de subversion culturelle » associe carrément communisme et satanisme. « Vous ne croyez pas au diable? dit-il, cela se comprend. Il nous crève les yeux par les fulgurations du rayonnement communiste et de ses crimes qui réussissent dans le monde à détraquer les cerveaux. Il assourdit votre entendement par l’excès de décibels du rock’n’roll, cet instrument d'une hystérie d’enfer conçu pour obstruer, dans les intelligences et dans les cœurs, l'audition de la voix de Dieu. Débarrassons notre pays, et finalement le monde, de ce fléau véritablement satanique ».

Au Québec, le phénomène prend de l'ampleur depuis la parution du livre « Le rock’n’roll, viol de la conscience par les messages subliminaux » du Père Jean-Paul Regimbal. Ce petit bouquin de 62 pages est rempli d’interprétations douteuses, d’exagérations et de faussetés. On y apprend, entre autres, que « l’étude de 18 cas de suicides survenus dans la région de Montréal-Granby-Québec en moins d’un an chez des jeunes de 15 à 21 ans, a démontré que la seule constante repérable en tous ces cas était le facteur musical du rock’n’roll ». « Mick Jagger s’est consacré à Satan sous l'influence de Marianne Faithfull ». « Au cours d’un week-end rock à Los Angeles, 650 jeunes gens ont trouvé la mort. Les corps ne pouvaient pas être identifiés. Les victimes étant des jeunes qui avaient laissé la maison familiale ».

Plus de 12 000 copies de ce pamphlet ont déjà été distribuées. Certaines de ces actions nous ramènent presque au Moyen-Âge, alors que l’Église avait constamment recours au Démon et à la frayeur qu’il inspirait pour menacer de l’enfer ceux qu’elle ne pouvait pas menacer des juges. Cette nouvelle croisade s’appuie en grande partie sur ces fameux messages cachés (souvent à peine audibles) qui se trouvent sur certains disques rock (Led Zeppelin, Eagles, Elo, Styx, etc).

Tout ne tient donc qu’à un fil, et il est bien mince, car encore aujourd’hui « il n’existe aucune preuve scientifique démontrant que le backward masking process ou messages subliminaux inversés puissent avoir une portée quelconque ». Imaginez-vous-qu’en plus d’être imperceptibles... ils sont à l’envers!

Alain Lamothe croit cependant qu’il s’agit d’un procédé ou technique utilisé pour diffuser certains messages. « Ces messages, qui ne peuvent être démasqués par nous que par une écoute à la renverse du disque, pénétreraient le subconscient; le cerveau humain étant assez complexe pour arriver à les décoder intégralement ». De toutes façons, pourquoi passer des jours et des nuits à faire tourner des disques à l’envers quand tout est si clair à l’endroit: Highway to Hell, Hell ain't a bad place to be. Hell's bell's. Running with the devil. Demons and wizards. The number ofthe beast. Suicide solution.

Depuis le succès du film The Exorcist, le diable et toute la symbolique qui y est rattachée est une source inépuisable d’idées pour artistes en mal d’inspiration. Le diable, comme la violence, se vend bien. On pique des idées dans un quelconque traité de sorcellerie. On sort l’attirail sataniste de la garde-robe (croix renversée et cierge noir). On se proclame adepte d’un quelconque culte démoniaque. Finalement, on donne un show en « Enfer » (le Forum pendant un spectacle de Black Sabbath). Le jeu de ces grands guignols du rock n’impressionne plus personne sauf, peut-être des adolescents qui se laissent séduire par l’image violente que véhicule ces groupes tant au niveau de leurs musiques, de leurs textes, que d’eux-mêmes.

Je lisais récemment dans une revue française (Actuel) cette phrase expliquant, en partie, la motivation réelle cachée derrière ces groupes dits « sataniques ». À propos d’un membre des Virgin Prunes, il est dit: « Il est fasciné par la force qui fermente sous les tabous et les superstitions, l’envie le prend de les parodier, de les singer, de les brandir bien haut pour ébranler un bon coup toutes les terreurs chrétiennes qui inhibent l’Occident. Il exploite toute la violence contenue dans les interdits de l’Église ». Le diable et le rock, une histoire de Bonhomme 7 heures? Je ne sais trop. Mais certains soirs, je mettrais bien dans les flammes la moitié de la discothèque de mon voisin d'à côté.

Avec la collaboration de Chantal Francke

(Québec Rock, Mai 1984, p. 42 à 45)