Le bienheureux Frédéric Janssoone

Le bienheureux Frédéric Janssoone

Par Benoit Voyer

4 aout 2025

Frédéric Janssoone nait le 19 novembre 1838, dans le nord de la France, a Ghyvelde. Il évolue au sein d’une famille profondément chrétienne qu’il qualifie d’« école de sainteté ». Il en est le cadet.

Son père est un cultivateur dont les affaires vont bien. Malheureusement, en 1847, il décède. Frédéric a 9 ans. Jouissant d’une situation enviable, sa mère se tire bien d’affaires malgré qu’elle se retrouve seule.

Malheureusement, à cause de mauvais placements d'argent, sa situation change du tout au tout.

Afin d'aider sa mère devenue veuve, il quitte ses études dont il excelle à cause de son intelligence au-dessus de la moyenne et devient commis voyageur.

Peu après le décès de sa mère, le 5 mai 1861, Frédéric se remet aux études.

Grâce à la dame chez qui il loue une chambre, il découvre saint François d'Assise. Il est fasciné par le personnage. Il veut marcher à la suite du troubadour d’Assise.

Chez les Franciscains
Après deux ans de cheminement vocationnel, le 26 juin 1864, il revêt le costume des Franciscains d'Amiens. Toute sa vie, Frédéric gardera la ferveur de cette première étape de sa formation à la vie franciscaine.

Ses études théologiques à peine terminées, on devance son ordination sacerdotale, qui a lieu le 17 août 1870. Ainsi donc, il devient prêtre franciscain a l’âge de 31 ans.

Sa première nomination est dans un hôpital militaire. Ce passage sera tout un défi pour lui. Les soldats, sur le ton du sarcasme, l’appelle: « Notre bon petit aumônier ».

Malgré tout, le jeune père Frédéric ressort enrichi de l’expérience. Au contact de la souffrance et de l'angoisse humaines, il apprend « la compassion » pour les blessés de la vie.

Missionnaire en Terre sainte
En secret, il a un grand rêve. Il aimerait travailler en Terre sainte, au pays de Jésus. Il aura le privilège d’y travailler de 1876 à 1888.

Dès son arrivée, il fait une première tournée de prédications dans les communautés religieuses. Rapidement, la réputation de sa sainteté commence à circuler. On chuchote: « C’est est un saint! »

Conciliateur-né, il codifie les règlements et ententes faites au cours des derniers siècles entre les diverses dénominations religieuses ayant des droits dans les basiliques du Saint-Sépulcre et de Bethléem. Cette codification est encore en vigueur aujourd'hui.

Pendant son séjour de douze ans à Jérusalem, Frédéric s'initie à la spiritualité du pèlerinage et parvient à reprendre, dans les rues de Jérusalem, l’exercice du « Chemin de Croix » abandonnée depuis trois siècles.

Au Canada
En 1881, Frédéric Janssoone fait un premier séjour au Québec. En 1888, il revient s’établir définitivement à Trois-Rivières.

Sa première mission est de fonder un Commissariat de Terre Sainte et de visiter les fraternités du Tiers-Ordre de saint François. En parallèle, il prêche, anime les pèlerinages au Sanctuaire de Cap-de-la-Madeleine et fait du porte-à-porte dans quatre diocèses.

Parler de Jésus, c'est toute la vie de Frédéric. Il visite presque toutes les municipalités du Québec. Il fait aussi des visites dans les États de la Nouvelle-Angleterre, aux États-Unis.

Un 22 juin pas comme les autres
Le 22 juin 1888, en soirée, le père Frédéric Jansoone vit une expérience intense qui marquera le reste de son existence.

Suite a la première journée de pèlerinage au nouveau sanctuaire Notre-Dame du Cap, il se retrouve en prière devant la statut représentant la mère de Jésus. Il est en compagnie de Pierre Lacroix, une personne handicapée et de l’abbé Luc Désilets, curé de la paroisse.

A un moment, les trois hommes prétendent avoir vu les yeux de la Vierge Marie s’ouvrir et porter son regard sur eux.

Le Franciscain comprend que Marie veut que la petite église de 1714 devienne un sanctuaire marial et qu'elle l'appelle à être le premier à prendre charge des pèlerinages en ce lieu.

Ses dons d'organisateur et sa ferveur religieuse contribuent a de ce petit lieu tout à fait inconnu, un lieu de pèlerinage national à la Vierge du Très Saint Rosaire. En plus de ses autres obligations, il travaille à cette mission pendant quatorze ans, soit jusqu’à l’arrivée des Missionnaires Oblats de Marie Immaculée, le 7 mai 1902, une congrégation religieuse fondée par saint Eugène de Mazenod, l’évêque de Marseille, en France.

A partir de ce jour, Frédéric, 65 ans, devient « commis voyageur du bon Dieu » afin de promouvoir de grandes fondations comme le Sanctuaire de l'Adoration perpétuelle à Québec, le Monastère des Clarisses à Valleyfield, le Monastère du Précieux-Sang à Joliette et la Chapelle Saint-Antoine à Trois-Rivières.

Il marchera jusqu'à dix heures par jour. De maison en maison, tentant de vendre un des livres qu'il a écrits.

Mais il fait bien plus cela. Les témoignages qui circulent sont unanimes. Il apporte à chacun réconfort et consolation. On le compare au saint frère André de l’Oratoire Saint-Joseph, à Montréal, un ami. On colporte qu’il guérit les coeurs brisés et les infirmités physiques.

Frédéric vit avec intensité sur le pas de François d’Assise. Il prie beaucoup, il mène une vie austère. Il veut être un pauvre parmi les pauvres.

Caractériellement, c’est un homme patient qui demeure en paix devant les défis qu’il doit surmonter.

La Chapelle de la Réparation
En 1896, le père Frédéric Janssoone aide Marie de la Rousselière a l’érection de la Chapelle de la Réparation, un nouveau sanctuaire consacré au Sacré-Cœur de Jésus.

Selon le témoignage de la dame, c’est le père Frédéric qui a suggéré la construction du chemin de croix a proximité du lieu de prière. En 1897, il bénira le site et reviendra souvent animer l’exercice spirituel sur le site.

A l’aide de son petit calepin noir, Frédéric s’est assuré des distances entre chacune des stations afin que son chemin de croix soit le plus conforme a celles entre les lieux ou Jésus a vécu sa passion à Jérusalem.

Les derniers temps
Même très malade, le père Frédéric Jansoone est présent au traditionnel pèlerinage en train qui conduisait les pèlerins de Montréal à Ste-Anne-de-Beaupré en ce beau 10 juin 1916. Il avait fait le voyage depuis Trois-Rivières pour venir les rejoindre.

A bord du train, il eut un grand malaise qui aurait pu l'emporter si Eugène Virolle, un médecin, avait été absent du périple.

À la suite de l'incident, le religieux de 78 ans disait aux gens: « C'est mon dernier pèlerinage avec vous. Je me sens mourir. Je n'en puis plus. »

De retour à Montréal, il se présente au cabinet du docteur Virolle pour un examen médical complet. L'omnipraticien découvre chez le septuagénaire un néoplasme de l'estomac, une forme de cancer. Le médecin ne tarde pas d'informer le supérieur des Franciscains qu'il était impossible de sauver le bon Frédéric.

En toute hâte, le père Janssoone se rend à Trois-Rivières - le temps d'une journée - pour régler des affaires urgentes. Le 15 juin 1916 sera la dernière fois qu'il mettra les pieds dans sa cité d'adoption avant de rendre l'âme. Il en était conscient. Le lendemain, il revenait à Montréal pour débuter ses traitements intensifs à l'infirmerie du couvent Saint-Joseph.

« Ne demandez pas ma guérison. Laissez faire le bon Dieu », disait-il aux individus qui venaient lui souhaiter un prompt rétablissement. Enfin, arrivait pour lui ce jour de la grande rencontre avec le Dieu qu'il désirait tant rencontrer.

Son ami, Alfred Bessette, le célèbre frère André de L'Oratoire St-Joseph, vient à sa rencontre afin de le réconforter. L'archevêque de Montréal, Mgr Paul Bruchési, le fait également à deux reprises. Son plus grand soulagement sera l'arrivée d'un confrère, le père Augustin. Il l'accompagnera de la vie à trépas. Ce 12 juillet fut mémorable.

« Que le bon Dieu vous récompense de la peine que vous vous êtes donnée pour venir consoler un vieillard expirant qui désirait ardemment vous voir avant de fermer les yeux à la lumière », lui lance du fond du cœur Frédéric Janssoone.

Départ pour le ciel
Le 4 août 1916 à 4h, à l’infirmerie des Franciscains, à Montréal, il a une sérieuse crise. Tous croient que c'est la fin. Cependant, il faudra attendre jusqu'à 16h pour que celle-ci arrive.

Le provincial des Franciscains lui administre les derniers sacrements. Le mourant répond aux prières. Dès qu'il commence à sombrer, le père Augustin s'approche de son compagnon et, pour répondre à une demande faite quelques jours plus tôt par Frédéric, dit doucement à l'oreille du défunt. Sans s’arrêter: "Veni, domine Jesu..." (Viens, Seigneur Jésus). Et Frédéric, embarquant dans ce mouvement invocatoire s’éteint paisiblement. Il était 16h55. Frédéric a 77 ans.

Après se funérailles, son corps est transporté à Trois-Rivières et est inhumé dans la chapelle Saint-Antoine. Dès cet instant, la population se met à la vénérer comme « un saint »

Un saint
Le père Frédéric Janssoone a été béatifié par le pape Jean-Paul II le 25 septembre 1988. Le Vatican étudie en ce moment le dossier du diocèse qui contient toutes les preuves nécessaires pour sa canonisation. Le miracle attendu a été déposé au Vatican par l’évêque de Trois-Rivières. La réponse finale tarde à venir…

Au Canada, à chaque 5 août, tous les catholiques soulignent sa mémoire dans le cadre des célébrations du jour. Frédéric repose dans le Sanctuaire des Franciscains, à Trois-Rivières, lieu de prière qui porte maintenant son nom.

La tombe du bienheureux Frédéric Janssoone au Sanctuaire qui porte son nom a Trois-Rivières