Vers le père, par le Fils, dans le Saint-Esprit


Voici que nous terminons, avec cet article, la série intitulée : “La Trinité dans ma vie”. Comme nous le disions précédemment, dans notre premier article : le mystère de la très sainte Trinité est le premier et le plus grand des mystères de notre foi ; il est le soleil resplendissant qui éclaire tous les autres mystères. Si Dieu a pris la peine de nous révéler ce secret de sa vie intime, c’est qu’il a voulu que cette lumineuse vérité éclaire, réchauffe et vivifie notre âme, notre propre vie intérieure.

Dans cette perspective trinitaire, on sait quasi-naturellement que la vie spirituelle du chrétien n’est rien d’autre que l’ascension de l’âme vers le Père, par le Fils, dans le Saint-Esprit.

Vers le Père
Il est touchant de lire la consolante parabole de l’enfant prodigue. Combien profitable pour nous demeure cet exemple du plus misérable des hommes qui soudainement décide de rompre avec sa condition sordide pour retourner en toute humilité et repentance a la maison paternelle : “Ibo ad Patrem: J’irai vers mon Père et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi. Je ne suis pas digne d’être regardé comme ton fils. Fais de moi l’un de tes serviteurs” (Lc 15, 18-19).

Tel doit être le premier geste de l’âme : reconnaitre sa misère, sa faiblesse native, puis prendre la décision énergique d’en finir avec sa vie passée pour dire elle aussi : “J’irai vers mon Père”.

Par le Fils
Une fois que l’âme a réussi à se fixer un but bien déterminé, elle s’applique à découvrir le moyen le plus efficace pour l’atteindre. Or, l’évangile, les épitres et la sainte liturgie ne cessent de répéter sur tous les tons que Jésus Christ est la voie, la vérité, la vie, l’unique médiateur, le seul pontife qui doit conduire les hommes vers le Père : “Nul ne va au Père si ce n’est par le Fils.”. C’est pourquoi la liturgie nous remet constamment sur les lèvres la formule finale : “Per Christum Dominum Nostrum: Par Jésus-Christ, notre Seigneur”.

Ainsi l’enquête de l’âme sincère prend vite fin car elle reconnait que le Christ Jésus est le seul qualifié à la conduire vers sa destinée éternelle. Lui seul, en effet, a franchi l’abime infini qui sépare Dieu de l’homme. Homme et Dieu a la fois, il est le pont jeté sur cet abime afin de permettre aux hommes de retourner à Dieu après s’être lui-même rendu auprès des hommes.

Engagée dans la voie purgative par sa décision courageuse, l’âme progresse maintenant dans les sentiers de la lumière, la voie illuminative, par Jésus-Christ Notre Seigneur. Elle est éclairée par les clartés de sa doctrine, elle est vivifiée par la vertu de ses sacrements, elle est transformée par la puissance de son exemple et elle est incorporée a lui par la grâce de la filiation dont sa propre filiation adoptive est une participation réelle bien qu’analogique.

Dans le Saint-Esprit
Sous l’action transformante de la grâce, l’âme s’élève enfin dans les régions béatifiantes de la vie unitive. Sa marche résolue dans la voie de la vérité la conduit bientôt dans la plénitude de la vraie vie, selon le vœu ardent du Christ: “Je suis venu afin qu’ils aient la vie et qu’il l’aient en en abondance”.
Or, la vie que Jésus vient de nous communiquer n’est autre que la vie divine de la très sainte Trinité, vie d’amour réciproque entre son Père et lui, vie consommée dans l’unité de leur commun Esprit.

Entrainée dans ce courant vital, l’âme se dépossède en quelque sorte d’elle-même pour s’abandonner à l’activité de Dieu en elle. Elle se laisse conduire par la main sous l’impulsion de l’Esprit saint comme l’enfant se laisse guider sous la direction de sa mère. O admirable passivité de cette vie unitive. O intense activité, o inépuisable fécondité de cette union mystique entre l’âme et son Dieu. O paix, o suavité de cet état sublime ou l’Esprit opère sans entrave dans l’âme qu’il habite sans partage.

Conclusion
Voilà, âme chrétienne, a quelle notre destinée la Trinité sainte t’appelle depuis l’instant de ton baptême ou, incorporée au Christ, tu es devenue la fille du Père, le temple de l’Esprit, le sanctuaire sacré de la très sainte Trinité.

Tout cela demeure pour toi du réel et du réalisme pour peu que tu te rendes compte des richesses qui sommeillent en toi, inexploitée, infructueuses, inappréciées quoique inappréciables. Hâte-toi d’inventorier tes trésors pour commencer, dès aujourd’hui ta progressive ascension vers Dieu le Père, par Dieu le Fils, dans le Saint-Esprit.

Jean-Paul Regimbal

Tiré de: Trinitas - revue du tiers-ordre et de l’archiconfrérie de la très sainte Trinité, 4e année, No. 5, décembre 1958 et janvier 1959, pp.6 à 8. Revue conservée a la Société d'histoire de la Haute-Yamaska, a Granby (Fonds P049).