24 décembre 2025
Réal Marchessault du quotidien La Voix de l’Est a eu vent que Danielle et moi étions pour recevoir un panier de Noel des Chevaliers de Colomb. Au bout du fil, il me demande si j’acceptais qu’un journaliste soit présent lors de leur passage.
L’idée ne m’enchante pas beaucoup. Puisque je ne veux pas lui déplaire et, surtout, parce que je ne veux pas compromettre mes chances de pourvoir travailler un jour au journal, j’accepte.
Le reportage de Françoise Boutin [1] sera bien écrit et les propos juste. En revanche, exposer en public ma misère sera une humiliation que je porterai toute ma vie. Près de quarante ans plus tard, je suis toujours triste de lire ce portrait d’un moment de ma notre vie familiale. Il y a une honte qui habite toujours en moi.
Les derniers mois ont été difficiles. Le mariage de misère, la maladie, les hospitalisations, ma situation professionnelle précaire… Je ne suis vraiment pas à mon meilleur.
Ce qui me fait garder la tête hors de l’eau? Il se résume en trois point : ma foi et Dieu, le grand amour que je porte pour Danielle et Jean-Pascal, notre bébé neuf, qui est ma grande fierté.
La journaliste et les Chevaliers de Colomb se pointent :
« Toc toc toc! "En voilà une surprise," s'exclame Benoit en ouvrant la porte. Danielle, déjà cachée derrière son mari, s'efface rapidement pour laisser passer les quatre pères Noël en civil. Jean-Pascal, heureux dans son innocence, se laisse porter par sa curiosité d'enfant. Son regard est attiré par les deux paniers de provisions déposés sur la table.
Une visite éclair mais combien appréciée. L’émotion se lit sur le visage de Benoit Voyer et de Danielle Gingras. Ils font partie des 150 familles visitées par les Chevaliers de Colomb de Granby, dimanche après-midi. Jean-Pascal, petit bout de chou âge de 16 mois, n'a qu'une préоccupation, se faufiler jusqu'aux paniers de Noël, un terrain de jeu en puissance.
"L'an passé, nous avions présenté une demande écrite. On nous avait répondu par l'affirmative. Cette année, la boite de Noël est un cadeau surprise.
Danielle, plus expressive, se demande pourquoi ils ont été choisis. "Un grand sentiment de joie nous envahit, explique-t-elle. Benoît s'extériorise moins, il cache un peu plus ses émotions. A 21 ans, l'expérience a remplacé l'innocence.
Le choc passé, les langues se délient. "Ça fait plaisir, c'est un cadeau du ciel. Toutes les fois qu'on a dû affronter une baisse financière, une aide nous est tombée du ciel. On a un bon Dieu pour nous," expliquent Danielle et Benoit tout en déballant et en plaçant fébrilement les provisions dans les armoires et le réfrigérateur.
Pendant ce temps, Jean-Pascal, prend ses aises. Il s'installe confortablement dans un des paniers. Les délicieux baisers d'enfant qu'il distribuait à profusion sont devenus de juteux baisers. Pommes, yaourts, petits gâteaux, bonbons, tout l'attire.
"Noël est pour nous une fête spirituelle, une fête pour les enfants, la magie de Noel." Jean Pascal, complice, approuve doucement. Il croque à pleines dents dans une pomme, se fruit qu'il adore, mais qu'il n'a pas l'occasion de savourer souvent.
Pas d'argent pour s'offrir des cadeaux cette année. Malgré tout, Noël sera plus heureux, plus facile. C'est que la boite de Noël comble certains besoins primaires. Elle leur permettra de cuisiner plusieurs petits plats, et de recevoir quelques amis, "puisque l'homme est un être social, qui a besoin de communiquer, commente Benoit.
Modeste, très propre, l'appartement où vit le jeune couple ne reflète pas le Noël commercial véhiculé par les magasins. Seulement quelques lumières entourent la fenêtre du sous-sol et scintillent dans la nuit. Pas de sapin de Noel. Pourtant, ils sont heureux, c'est évident.
Finalement, Noel est mal placée. Les fins de mois sont dures. Les 200$ prévus dans le budget mensuel pour l'achat de la nourriture ne sont pas suffisants. "Toutes les personnes qui reçoivent des paniers de Noel en ont besoin," souligne Danielle.
Jean-Pascal joue, se promène, essaie de communiquer. Il s'approche très près des visiteurs. "Nous remontons la pente," relate Benoit. L'an passé, il est tombé gravement malade. Alité à la suite d'une mononucléose infectieuse, dégénérée en paralysie faciale du côté gauche, il a dû subir deux opérations, dont une de sept heures. Sa convalescence a duré plusieurs mois.
"Un passage, de dire Benoit. Leurs difficultés financières découlent d'une trop grande accumulation d'événements, mariage, naissance d'un enfant, surmenage, maladie.
Toutes les familles visées par les Chevaliers de Colomb vivent sous le seuil de la pauvreté. Leur salaire, c'est l’aide sociale. Les paniers de Noël contribuent temporairement à alléger le poids d'un Noel s'annonçant parfois trop creux. "Le courant de notre société serait peut-être différent si les privilégiés étaient un peu plus confrontés à la pauvreté", conclut Benoit Voyer.
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[1] Françoise Boutin. « Un Noël plus heureux pour Benoît, Danielle et Jean-Pascal - Les Chevaliers de Colomb leur ont réservé deux paniers de provisions », La Voix de l’Est, 24 décembre 1987, p. 3
L’idée ne m’enchante pas beaucoup. Puisque je ne veux pas lui déplaire et, surtout, parce que je ne veux pas compromettre mes chances de pourvoir travailler un jour au journal, j’accepte.
Le reportage de Françoise Boutin [1] sera bien écrit et les propos juste. En revanche, exposer en public ma misère sera une humiliation que je porterai toute ma vie. Près de quarante ans plus tard, je suis toujours triste de lire ce portrait d’un moment de ma notre vie familiale. Il y a une honte qui habite toujours en moi.
Les derniers mois ont été difficiles. Le mariage de misère, la maladie, les hospitalisations, ma situation professionnelle précaire… Je ne suis vraiment pas à mon meilleur.
Ce qui me fait garder la tête hors de l’eau? Il se résume en trois point : ma foi et Dieu, le grand amour que je porte pour Danielle et Jean-Pascal, notre bébé neuf, qui est ma grande fierté.
La journaliste et les Chevaliers de Colomb se pointent :
« Toc toc toc! "En voilà une surprise," s'exclame Benoit en ouvrant la porte. Danielle, déjà cachée derrière son mari, s'efface rapidement pour laisser passer les quatre pères Noël en civil. Jean-Pascal, heureux dans son innocence, se laisse porter par sa curiosité d'enfant. Son regard est attiré par les deux paniers de provisions déposés sur la table.
Une visite éclair mais combien appréciée. L’émotion se lit sur le visage de Benoit Voyer et de Danielle Gingras. Ils font partie des 150 familles visitées par les Chevaliers de Colomb de Granby, dimanche après-midi. Jean-Pascal, petit bout de chou âge de 16 mois, n'a qu'une préоccupation, se faufiler jusqu'aux paniers de Noël, un terrain de jeu en puissance.
"L'an passé, nous avions présenté une demande écrite. On nous avait répondu par l'affirmative. Cette année, la boite de Noël est un cadeau surprise.
Danielle, plus expressive, se demande pourquoi ils ont été choisis. "Un grand sentiment de joie nous envahit, explique-t-elle. Benoît s'extériorise moins, il cache un peu plus ses émotions. A 21 ans, l'expérience a remplacé l'innocence.
Le choc passé, les langues se délient. "Ça fait plaisir, c'est un cadeau du ciel. Toutes les fois qu'on a dû affronter une baisse financière, une aide nous est tombée du ciel. On a un bon Dieu pour nous," expliquent Danielle et Benoit tout en déballant et en plaçant fébrilement les provisions dans les armoires et le réfrigérateur.
Pendant ce temps, Jean-Pascal, prend ses aises. Il s'installe confortablement dans un des paniers. Les délicieux baisers d'enfant qu'il distribuait à profusion sont devenus de juteux baisers. Pommes, yaourts, petits gâteaux, bonbons, tout l'attire.
"Noël est pour nous une fête spirituelle, une fête pour les enfants, la magie de Noel." Jean Pascal, complice, approuve doucement. Il croque à pleines dents dans une pomme, se fruit qu'il adore, mais qu'il n'a pas l'occasion de savourer souvent.
Pas d'argent pour s'offrir des cadeaux cette année. Malgré tout, Noël sera plus heureux, plus facile. C'est que la boite de Noël comble certains besoins primaires. Elle leur permettra de cuisiner plusieurs petits plats, et de recevoir quelques amis, "puisque l'homme est un être social, qui a besoin de communiquer, commente Benoit.
Modeste, très propre, l'appartement où vit le jeune couple ne reflète pas le Noël commercial véhiculé par les magasins. Seulement quelques lumières entourent la fenêtre du sous-sol et scintillent dans la nuit. Pas de sapin de Noel. Pourtant, ils sont heureux, c'est évident.
Finalement, Noel est mal placée. Les fins de mois sont dures. Les 200$ prévus dans le budget mensuel pour l'achat de la nourriture ne sont pas suffisants. "Toutes les personnes qui reçoivent des paniers de Noel en ont besoin," souligne Danielle.
Jean-Pascal joue, se promène, essaie de communiquer. Il s'approche très près des visiteurs. "Nous remontons la pente," relate Benoit. L'an passé, il est tombé gravement malade. Alité à la suite d'une mononucléose infectieuse, dégénérée en paralysie faciale du côté gauche, il a dû subir deux opérations, dont une de sept heures. Sa convalescence a duré plusieurs mois.
"Un passage, de dire Benoit. Leurs difficultés financières découlent d'une trop grande accumulation d'événements, mariage, naissance d'un enfant, surmenage, maladie.
Toutes les familles visées par les Chevaliers de Colomb vivent sous le seuil de la pauvreté. Leur salaire, c'est l’aide sociale. Les paniers de Noël contribuent temporairement à alléger le poids d'un Noel s'annonçant parfois trop creux. "Le courant de notre société serait peut-être différent si les privilégiés étaient un peu plus confrontés à la pauvreté", conclut Benoit Voyer.
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| Benoit Voyer, Danielle Gingras et Jean-Pascal. |
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[1] Françoise Boutin. « Un Noël plus heureux pour Benoît, Danielle et Jean-Pascal - Les Chevaliers de Colomb leur ont réservé deux paniers de provisions », La Voix de l’Est, 24 décembre 1987, p. 3
Photos: Société d'histoire de la Haute-Yamaska P026-19871219-D05-P014 et P015

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