Jean-Paul Regimbal et le renouveau charismatique

Il était une fois dans les médias...


Par Benoit Voyer (1995)

Le père Michel Vigneau a bien connu le célèbre prédicateur puisqu’il entrait dans la même communauté religieuse en 1973. L’année précédente, il rencontrait le père Regimbal pour la première fois lors d’une soirée de prière à Montréal.

"Il attirait beaucoup de gens. C’est entendu qu’il était dérangeant. Pourtant, j’ai souvent le supérieur de l’époque dire : « On ne peut pas arrêter, car, fondamentalement, il se fait beaucoup de bien. Les gens revenaient, se confessaient, allaient à la messe, retrouvaient le goût de la prière dans leur vie. Ils étaient plus épanouis… “ se souvient le père Vigneau.

Il admet que certaines personnes exagéraient. Il se rappelle qu’il a fallu en remettre plusieurs sur la bonne voie.

Les liens avec l’ex-évêque de St-Hyacinthe, Mgr Albert Sanschagrin, étaient très bons.

« Le père Jean-Paul était quelqu’un de très transparent. Ce qu’il disait dans le bureau, il le répétait en public. C’était un bonhomme qui enseignait la doctrine de l’Église. Il savait par cœur les actes du Concile ».

Jean-Paul Regimbal n’a pas hésité à consulter l’évêque du lieu. Puisque c’était nouveau, Mgr Sanschagrin lui a dit : « Continue! Si c’est de Dieu, ça tiendra! »

Régulièrement, le prélat diocésain s’informait. Lorsque le supérieur lui disait que la maison de ressourcement était débordée par l’affluence au sacrement du pardon, il disait : « Continuez, c’est très bien! »

Pour le leader charismatique, le renouveau initié consiste en une rencontre personnelle avec Jésus Christ. “... et c’est par l’Esprit saint qui a été donné à l’Église pour nous faire entrer dans la vie du Christ vivant qui lui nous introduit vers le Père que Jean-Paul Regimbal le favorisait”, insiste Michel Vigneau.

Il ajoute: “Il disait toujours que l’expérience de l’Esprit consiste à un retour aux sources de l’Église. C’est entendu qu’aujourd'hui, il y a des déviations et cela est normal puisque nous sommes des humains! Peut-être avons-nous trop insisté sur les manifestations de l’Esprit alors qu’il fallait s’orienter vers la rencontre personnelle avec Jésus!”

L’expérience de vie initiée par le père Regimbal se poursuit toujours. Elle a rapidement dépassé le monastère granbyen pour se propager jusqu’à l’Europe et l’Afrique.

Le nombre d’adeptes est légèrement à la baisse au Québec. Cependant, ailleurs dans le monde, il connait une grande popularité.

Le père Émilien Tardif, un Québécois missionnaire en République dominicaine, a connu cette expérience à Granby grâce à Jean-Paul Regimbal. Actuellement, il siège sur le Conseil mondial du renouveau charismatique à Rome.

La rencontre
Lors d’un souper du regroupement ACTE Montréal en 1980, le père Regimbal racontait avec enthousiasme, l’expérience spirituelles de sa vie.
“C’est comme si je revivais un extrait du texte d’Osée: “C’est pourquoi, je vais le séduire, le conduire au désert et parler à son cœur. Je lui rendrai ses vignobles...”, disait-il.

En 1969, suite à une recommandation médicale, l’Ordre de la très sainte Trinité décide de l’envoyer à Phoenix en Arizona. Là-bas, l’air plus sec aiderait ses problèmes d’asthme.

Il poursuivait: “Dix ans de travail dans les prisons du Québec m’avaient fait voir la puissance de Dieu dans les cœurs et l’impuissance de mon ministère sacerdotal. Je travaillais dur et, pourtant, je trouvais que les conversions ne correspondaient pas aux efforts multiples que je déployais pour rejoindre cette population carcérale”.

Pour donner plus de poids a sa pastorale, il faisait appel à la psychologie, a la psychiatrie et à la sociologie. Plus le temps avançait, moins la Parole de Dieu prenait de l’importance dans son travail.

"Quand j’ai pris la route de l’Arizona, mon cœur était lourd. Je ne comprenais pas... Je trouvais mes supérieurs bornés”, stipulait le fils de Jean de Matha.

Après une quinzaine de jours de repos, il téléphone à l’évêque du lieu afin de lui offrir ses services. Il lui proposa de remplacer un prêtre malade a la paroisse Ste-Thérèse-de Phoenix.

“J’ai commencé à travailler à Ste-Thérèse le 9 septembre 1969. C’est quand même une signification! Le 9 du 9e mois en 1969. Il était 9h et Dieu préparait dans ma vie l’avènement de la 9e heure (rire)”, lançait-il à la blague. Le 9 septembre 1969, il entre en fonction.

Ce matin-là, Sandy Winters vient le rencontrer au bureau. Cette anglicane désirait inscrire ses enfants à l’école catholique et se questionnait sur le contenu académique.

Après avoir obtenu les réponses espérées, elle lui demande : « Accepteriez vous d’être mon directeur spirituel? » Après avoir tenté de la diriger vers un pasteur de son Église, elle ajoute : « Je vis des situations étranges, des phénomènes spirituels particuliers et j’ai entendu dire que les Catholiques attachaient beaucoup d’importance à cela ».

Jean-Paul Regimbal finit par accepter de l’écouter. Elle lui raconte qu’elle parlait en langues, qu’elle prophétisait, qu’elle a reconduit trois prêtres à l’exercice de leur sacerdoce, etc.

Croyant à un cas de psychose religieuse, il concluait cette rencontre en lui disant qu’il recommuniquerait avec elle afin de lui livrer sa réflexion. Avant de partir, il lui fit citer des passages des Écritures ou il est question de ces manifestations.

Après une réflexion sérieuse et un regard en profondeur sur l’expérience de la pentecôte des premiers disciples, de la vie des Pères de l’Église au long des cinq premiers siècles et de l’enseignement du Concile Vatican II, il se rendit chez elle.

Dans sa cuisine (11 septembre), ou elle s’affairait à préparer le repas, il lui demande de lui « imposer les mains » pour recevoir les mêmes grâces qu’elle. L’expérience transforma sa vie.

Puisqu’il n’y avait pas de Catholiques vivant ce phénomène à Phoenix, il se joignit à un groupe œcuménique charismatique. Rapidement, il devint reconnu et la nouvelle se répandit: « Un prêtre catholique qui prophétise et fait des miracles! ». Quelques semaines plus tard, il prêcha au Groenland.
L’année suivante, il revint travailler au Québec. Il fit de la prédication de retraites... nouveau genre. Tous connaissent la suite.

Le père Jean-Paul Regimbal est décédé le 8 septembre 1988.



Tiré de la Revue Notre-Dame du Cap, octobre 1995, pp. 20 et 21. Copie conservée a la Bibliothèque du Séminaire de Saint-Hyacinthe